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Hall Barry Greenland est un militant politique australien, proche du Pablisme (Michel Raptis). En 2013 il était le candidat de Verts australien à Grayndler.

Le dernier des grands dirigeants révolutionnaires du XXe siècle est mort. Cela me fait revenir au temps de ma jeunesse, avec Gandhi, Nehru, Ho Chi Minh, Mao, Lumumba, Soekarno, Nasser, Tito, Ben Bella et dont la liste pourrait continuer. Sans oublier Martin Luther King et Malcolm. Sans oublier les autres cubains et le Che.

Des leaders charismatiques - c’était leur principale caractéristique au temps de la grande révolution anticoloniale du siècle dernier. Et quelle glorieuse avancée de la révolution : la fin des empires et des vieux impérialismes, l’entrée des people of color sur la scène de l’histoire en tant qu’acteurs. Tant de figures extraordinaires qui étaient adaptées à la grandeur historique du moment.

En parlant de grandeur, il était difficile de résister à la fascination historique de la révolution cubaine et de son chef. Un petit groupe de camarades, navigant sur leur yacht Granma, du Mexique vers une petite baie sur la côte de Cuba. La lutte contre l’armée régulière pour échapper à la mort. La création de la commune armée dans les montagnes. La marche insurrectionnelle d’un bout de l’île à l’autre, rejointe ensuite par un peuple triomphal et joyeux. Un soulèvement dirigé par de beaux révolutionnaires barbus à la tête d’une joyeuse parade armée des opprimés. Tous capturés sur des photographies et occasionnellement des films – en noir et blanc – avec Fidel au centre de la scène.

C’était la révolution, et pas un simple casting, qui fleurait bon toutes les grandes Libérations de notre culture historique. Je pense à Garibaldi et ses chemises rouges qui envahissent la Sicile en 1860 et suscitent le soulèvement des paysans pour une marche étincelante sur Rome. Mais pourquoi pas encore plus loin en arrière, l’entrée de Jésus de Nazareth à Jérusalem. Hyperbole ? Peut-être. C’était comme ça dans les décennies du milieu du siècle dernier.

Et puis Fidel et les cubains étaient de grands et héroïques indemnes, défiant le plus puissant de tous les impérialismes. Indemnes parce que le peuple armé a triomphé malgré la baie des cochons et les tentatives d’assassinat de la CIA. Risibles, oui (qui peut oublier les cigares qui explosent ?) mais mortelles dans l’intention.

Afin de garantir l’indépendance de Cuba, il était nécessaire de prendre le contrôle de son économie, et cela signifiait la nationalisation des grandes industries et l’expropriation des étrangers et des propriétaires compradors. Ce que Washington n’était pas disposé à accepter. Ainsi, le long [et continu] blocus et les sanctions.

Et alors Fidel s’est tourné vers l’Union soviétique qui généreusement a assuré la survie de la révolution cubaine. Que cette générosité soit historiquement déterminée – après tout, l’Union soviétique était le grand survivant de la lutte anti impérialisme du siècle dernier. Son soutien des cubains était « naturel »

Bien sûr il y eu des « erreurs » qui ont marqué le sort de la révolution cubaine dans sa première décennie. Je pense ici aux incitations morales, au volontarisme, au pari sur le sucre ainsi qu’au régime de parti monolithique. Mais Fidel et les Cubains étaient les prisonniers de l’histoire. Ils n’avaient aucun autre modèle – les tentatives d’en créer étaient soit de courte durée (Algérie) ou trop limitée (Yougoslavie). L’inconvénient de l’aide soviétique fut l’adoption du modèle soviétique.

Cela signifiait, qu’il y a eu des actes impardonnables de Fidel. Dans les années 60, nous avons été terriblement choqués par le soutien de Fidel à l’invasion soviétique de la Tchécoslovaquie et à la répression de toute tentative pour créer un socialisme démocratique.

Mais le défi et la survie ont été maintenus au cours des décennies et c’est pour cela que Fidel et Cuba ont été honorés. Comme à juste titre pour leurs réalisations extraordinaires sur le plan intérieur : l’alphabétisation, l’un des premiers systèmes d’éducation au monde, et la meilleure pratique médicale de masse sur la planète. Fidel a su insuffler une conscience révolutionnaire vivante : des femmes et des hommes Cubains, à juste titre célébrés et devenus légendaires, sont allé soutenir avec abnégation les Angolais et les Sud-africains dans leurs luttes émancipatrices.

Il n’y aura pas d’autres Fidel. Les autres révolutions du siècle dernier, principalement la révolution féministe et l’élévation du niveau culturel, signifient que les révolutions dans ce siècle seront très différentes. Nous pouvons critiquer tout en honorant les tentatives révolutionnaires incroyables et généreuses du siècle dernier et leurs héros et héroïnes. Fidel fait partie de ce Panthéon. Sans aucun doute.

Australie, 27 novembre 2016