Déclaration d'Oskar Lafontaine

Conférence de presse tenue dans la Berliner Kulturbrauerei à la suite des élections législatives allemandes d'octobre dernier.

La Gauche a été fondée il y a seulement deux ans. Nous avions pour objectif de sortir renforcés dans ces élections au Parlement fédéral (Bundestag). Nous aussi avions l'objectif d'entrer, non seulement dans les Parlements des Etats fédérés de l'ancienne Allemagne orientale, mais aussi dans au moins trois des Parlements allemand-occidentaux. Nous avons clairement dépassé nos objectifs. Nous disposons maintenant d'une représentation parlementaire dans six Parlements des Etats fédérés occidentaux. Dans les élections au Parlement fédéral, nous avons obtenu en peu de temps un pourcentage de votes à deux chiffres. On peut dire sans aucune exagération que La Gauche a définitivement modifié le système de partis allemand.

Nous avons maintenant en Allemagne, cinq ou six partis. Nous devons penser maintenant aux tâches que nous devrons supporter. Aucun gouvernement n'est parvenu jusqu'à présent à réguler de manière satisfaisante le secteur bancaire. De fait, ils préparent en ce moment même ce qui sera un nouveau crash mondial, car nulle part a été mis un frein aux opérations dangereuses de l'industrie financière. Ce n'est un secret pour personne que les managers de Wall Street comme les banquiers allemands disent qu'ils continueront à agir comme précédemment, à la seule différence que personne ne le remarquera. Nous faisons face à un défi énorme, parce que la crise actuelle a pour principal effet de coûter des milliers et millions de places de travail. Que la politique soit incapable de réagir avec une régulation adaptée et ce sera fatal.

Sur cette toile de fond émerge un paradoxe : l'Etat est passé au premier plan pour réclamer une régulation au niveau, ainsi qu'au niveau national, alors que subsistent des forces fondamentalement contre ces nécessités politiques pressantes. En première ligne certainement les chrétiens démocrates, mais un peu moins que les démocrates-libéraux. Nous avons besoin d'une coalition qui définisse les tâches de notre époque, ainsi que la fonction de l'Etat dans notre société et en particulier la redéfinition d'une règlementation des marchés. Cela n'a pas eu lieu. Maintenant tous les regards se portent sur la social-démocratie allemande, qui souffre d'une de ses pires défaites électorales car elle a été incapable même de faire déplacer ses électeurs aux urnes.

Avec cette nouvelle majorité C.D.U.-F.D.P s'annonce une politique clairement antisociale. Le Bundesrat y jouera un rôle déterminant. Il influencera la politique allemande et donc l'attitude de la social-démocratie dans chaque Etat fédéré. Dans la Sarre, ils ont déjà donné leur réponse. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'insister sur cela. Comment cela se fera-t-il dans le Brandebourg ? Comment Nous le percevons déjà. Comment cela se terminera-t-il en Thuringe, nous le percevons déjà 1. Dans chaque cas, les sociaux démocrates devront se poser avant tout cette question : participer ou non au démantèlement des acquis sociaux. Ce qui va se jouer en Rhénanie du nord-Westphalie sera décisif. Disposer de la majorité au Bundesrat est si importante pour la politique fédérale que les élections en mai prochain vont se transformer en petites élections au Parlement fédéral.

Suite dans Utopie Critique N°50