« Message. Chers amis, Georges est décédé hier soir jeudi 12 février à 23 h 45 d'une hémorragie cérébrale.
Les obsèques auront lieu le mardi 17 février vers 15 heures au cimetière du Pecq...
Amitiés. Nadya. »
Combien ce télégramme a été si douloureux, si insupportable, qu'il a fallu envoyer... Chers camarades, chers lecteurs qui avez apprécié depuis de nombreuses années la participation précieuse, continue, de notre camarade Georges Labica, si sérieux, et des plus combatifs, engagé à la contribution de la lutte révolutionnaire pour le socialisme, si impliqué au sein de l'équipe d'«Utopie critique », nous avons tous été assommés par cette dramatique nouvelle que Nadya a dûe nous faire savoir.
Nadya, sache combien Georges nous a tenus au cœur et combien nous partageons sa douleur. C'est bien au loin, comme ici, que tous nous nous souviendrons de Georges...
« Comment dire adieu à notre ami Georges sans déchirement ? Il nous a accompagné dans tous nos combats de franc-tireurs, car, pour lui, aucune cause n'était perdue si elle était juste. Il nous a prémuni contre toute tentation de léthargie intellectuelle, car son esprit était toujours en éveil : s'il y a quelqu'un qui ne s'est jamais laissé prendre dans les rêts de l'idéologie dominante, c'est bien lui. Il nous a enseigné, lui qui n'a jamais joué au maître à penser, que la philosophie doit s'occuper de tout ce qu'elle dédaigne ordinairement. Il nous a toujours surpris et émerveillés par son immense érudition. Il nous a rapporté des échos du monde entier, qu'il sillonnait partout où il voyait, fût-ce sous des formes contrefaites, une promesse d'un monde meilleur. Il nous a fait redécouvrir les grands rebelles de l'histoire, sans complaisance pour autant. Il nous a constamment montré que l'ironie peut être une arme, et que l'on peut être révolutionnaire et bon vivant. » C'est tout cela qui nous manque déjà, et qui va manquer à tant de personnes de par le monde, qui se souviendront toujours de ses analyses, de ses encouragements, de son esprit de fraternité. Sartre disait que "la mort transforme la vie en destin", mais le destin de Georges n'est pas clos : c'est nous désormais qui en sommes comptables, en continuant à faire vivre sa pensée et en retenant sa leçon. Il s'est peut-être dit, comme Mao, "le jour où je comparaîtrai devant Marx, je voudrais ne pas avoir à rougir." Eh bien, en tant qu'héritiers, nous pouvons certainement le rassurer. Et lui dire : "Georges, tu nous accompagneras toujours, et bien d'autres après nous. C'est pourquoi nous ne te disons pas vraiment adieu, mais au revoir." »
Tony Andréani et Gilbert Marquis