La Convention constitutionnelle a tenu son deuxième mois de session avec quelques problèmes, dont la démission de l’un de ses vice-présidents pour avoir menti au sujet de sa maladie. La crise de la Liste du Peuple a ensuite mis à rude épreuve les imaginaires du militantisme social et de la volonté chilienne. Elle semble avoir passé la phase de questionnement et le moment de la politique a commencé.
La population chilienne avait placé de nombreuses attentes dans la capacité du processus constituant actuel à répondre aux maux qui ont conduit à l’explosion sociale en octobre 2019 (dite de « l’Octubrismo »). 52% des Chiliens ont désigné « l’espoir » comme caractère essentiel de ce processus, suivie par la « joie », avec 46%.
Pour comprendre ces attentes, il faudrait partir de ce qui a fait « exploser » le peuple chilien. Une question à laquelle, près de deux ans après les faits, il est loin d’être entièrement répondu.
L’explosion sociale a réussi à faire confluer une variété de sentiments et de demandes aussi divers que pressants. De la critique du prix du péage routier aux questions sur le modèle de développement minier, en passant par les demandes concernant un large éventail de droits sociaux, culturels etc. C’était une effervescence sociale sans structure ni porte-parole connu. Ainsi, s’il y avait une formule qui caractériserait cette foule multiforme, se serait « l’opposition à l’autre », cet autre désignant les structures politiques traditionnelles, les partis, et leur représentation.
La baisse de confiance dans les institutions a marqué la politique chilienne de ces dernières années. Dans ce cadre, aucune institution n’a été aussi touchée que les partis politiques. Non seulement les partis n’atteignent que 6% de confiance, mais il y a aussi un phénomène à long terme lié à leur désidentification qui s’est accélérée au cours de la dernière décennie.
Selon les données du Center for Public Studies, le pourcentage de personnes s’identifiant à un parti est passé de 53 % de la population en 2006, à 22 % en 2019. De plus, certaines études récentes ont indiqué qu’un pourcentage non négligeable de la population (12,9%) a fait de la critique anti parti traditionnelle, sa principale identité.
Afin de canaliser institutionnellement la mobilisation qui a eu lieu dans les rues du Chili, un accord politique transversal a lancé un processus constituant donnant voix à ces nouveaux acteurs. Cet accord obligeait un geste sacrificiel de l’élite politique, cédant la Constitution de 1980 pour accepter que les nouvelles règles soient rédigées par un organe autre que le parlement. En particulier, il a été convenu qu’une Convention constitutionnaliste serait chargée de la rédaction du nouveau texte constitutionnel.
Pour que cet espace soit consolidé comme instance différente de celle des autres formes de représentation conventionnelle de la politique, il a été convenu qu’il devrait répondre à trois caractéristiques fondamentales. Premièrement, la parité entre les sexes serait garantie pour les conventionnels élus. Deuxièmement, des quotas réservés aux « peuples d’origine » ont été établis. Enfin, en accord reflétant le fort sentiment anti partis des mobilisations, la Convention a mis en place un mécanisme inédit pour faciliter les candidatures indépendantes. Ces candidats indépendants pourront se regrouper sur des listes leur permettant d’additionner les voix et de rivaliser sur un pied d’égalité avec les partis, sans avoir besoin de s’y conformer en tant que tels.
La relation des forces mobilisées par l’accord qui a donné naissance au processus constituant était quelque peu ambivalente. Certaines de ces forces et le Parti communiste y ont vu une trahison, notamment l’acceptation d’un quorum des deux tiers pour approuver les dispositions constitutionnelles.
Le principal rappel était que, si la droite et les forces conservatrices atteignaient un tiers de la Convention, elles pourraient avoir un droit de veto.
Ensuite, le PC et les forces émergentes anti partis ont décidé de participer au processus, en maintenant une position critique et cherchant à soumettre le processus à une contrainte interne, allant au-delà de ce qui était prévu par l’accord initial.
Le soutien massif au projet constituant, perçu comme moyen de canaliser le mécontentement a été confirmé lors d’un plébiscite ouvrant ce processus. Les Chiliens ont décidé d’ouvrir la voie vers une nouvelle constitution, avec près de 80% des voix pour.
La surprise électorale et la Liste du peuple
Avec le résultat d’un plébiscite, l’enthousiasme pour le processus s’est traduit par un flot de candidatures indépendantes qui se sont formées à travers le pays. Le nombre de ces listes d’indépendants était tel que certains analystes prévoyaient un résultat électoral médiocre, car la dispersion entre les diverses options pouvait faire que le flux des voix ne se traduise pas par des sièges. Certains espéraient ainsi, une conformation pas très différente de celle du Parlement de l’époque, avec hégémonie des coalitions historiques de droite et de centre-gauche.
Ce que ces analystes n’ont pas réussi à anticiper, c’est, d’une part, que la mobilisation électorale qui a été générale par opposition à celles concernant les deux blocs historiques et, d’autre part, qu’il y aurait une liste d’indépendants qui deviendra le symbole de la politique « indépendante » : la Liste du peuple.
Sur la Liste du peuple, convergent au moins trois groupes qui sont à l’origine de l’explosion sociale. Tout d’abord, un groupe de dirigeants qui ont réussi à donner « chair » au récit de cette crise qui a été baptisée du terme « d’octubrismo » (d’Octobre). Ce groupe, qui avait son épicentre dans les mobilisations périodiques de la Plaza Italia, rebaptisée Plaza Dignidad, avait l’avantage que ses principaux représentants avaient acquis un certain niveau de notoriété médiatique et, en même temps, une légitimité sociale pour avoir participé aux manifestations.
Parmi les figures les plus reconnues de ce groupe figuraient deux manifestants qui sont devenus célèbres pour leurs costumes emblématiques : un costume de Pikachù - une espèce de Pokémon - (Giovanna Grandon) et un costume de dinosaure (Cristobal Andrade). La plupart étaient des gens qui n’avaient pas de parcours politique et qui avaient vécu l’explosion sociale comme un « réveil ». Leur leadership tenait à leur capacité de performance. Ils symbolisaient les victimes d’abus présentes dans les manifestations en leur donnant la parole. Ils sont ainsi devenus partie d’un panthéon de héros de la révolte sociale incarnant la voix de Plaza Dignidad.
Elus tous les deux, leur présence a réussi à donner une légitimité à la Convention car elle concrétisait la continuité entre l’explosion sociale et le processus constitutionnel.
Le second groupe de la Liste du Peuple pouvait être perçu comme une gauche qui a vu dans l’éclatement social l’avancée attendue de l’effondrement du modèle néolibéral. Groupe qui avait participé à des paris électoraux antérieurs, sans résultat, et qui avait été dans les orbites du PC et d’autres partis de gauche.
Ils possédaient la légitimité de ne pas être des partis, bien qu’ils aient acquis de l’expérience dans les conflits électoraux. Comme par exemple la participation d’une fraction du mouvement trotskiste qui a réussi à obtenir un élu constituant.
Enfin, sur les 145 candidats présentés par la Liste du Peuple, 68 appartenaient à des mouvements sociaux pour la plupart sis en dehors de Santiago (les deux premiers groupes étaient prééminent dans la capitale). L’un des enjeux réussis de la Liste du Peuple a été une certaine médiatisation grâce à un clip de télévision réussi sur la situation sociale qui regroupait plusieurs de ces mouvements sociaux, qui se sont rajoutés à la fin de l’inscription des listes, ce qui explique que certaines listes n’avaient pas le nom « Liste du peuple ».
La Liste du peuple a connu une ascension véritablement fulgurante et a fini par définir le processus constituant que connaît le Chili. Le groupe né à l’avant-garde de l’explosion sociale est devenu l’icône de l’émergence d’un nouvel acteur politique fuyant les partis cherchait plutôt une nouvelle forme d’organisation politique.
Un certain nombre d’éléments expliquent son succès électoral inattendu, mais personne ne peut nier, qu’au fond, ce groupe avait réussi à donner de la chair à une idée qui planait depuis longtemps dans le débat public : l’idée que les victimes dites d’une « coalition d’abus » (perpétués par des entrepreneurs, politiciens, économistes, etc.) puissent arracher le pouvoir à une élite indolente. Et il n’y a rien de plus puissant qu’une idée lorsque son temps est venu.
Le résultat électoral de la Convention a porté un coup aux attentes de ceux qui espéraient un retour à la politique classique d’avant l’explosion sociale.
Premièrement, les deux coalitions historiques n’ont arraché que de maigres résultats. La droite a obtenu un pauvre pourcentage de voix : 20%, loin d’atteindre le tiers d’élus conventionnels et un possible droit de veto. La coalition de centre-gauche a vu les forces au centre et les plus modérées s’effondrer. L’exemple le plus notoire de cette crise a peut-être été celui de la démocratie chrétienne, qui n’a réussi à élire qu’un de ses militants pour la Convention constitutionnelle (le président du parti).
Deuxièmement, l’alliance électorale récemment passée entre le Parti communiste et la nouvelle gauche du Frente Amplio, Front large, a surpris avec un résultat électoral démontrant sa pertinence politique.
Troisièmement, le jalon le plus pertinent de cette élection, est le succès retentissant du côté des indépendants. Sur les 155 membres de la Convention constitutionnelle, 103 ne sont pas tous des militants politiques. Certains de ces indépendants ont été élus sur des listes de partis, mais un contingent important d’entre eux a été élu sur les listes indépendantes. Parmi celles-ci, la liste du peuple (27 sièges) a recueilli le plus de votes.
En définitive, la Convention a montré un niveau important de fragmentation entre les forces politiques traditionnelles et indépendantes et l’intégration de nombreuses personnalités sans expérience politique préalable ni loyauté envers les collectifs politiques.
Aucune force n’a atteint, seule, les deux tiers nécessaires pour voter les dispositions constitutionnelles, ou disposer du droit de veto. Qu’ils le veuillent ou non, ils étaient tous condamnés à s’entendre.
La Convention commence
Les premières réunions de la Convention constitutionnelle ont ouvert un processus accéléré de formation de nouvelles alliances, de clivages et d’adversités. Si les conventionnels ont résisté à former un groupe unique, pour se différencier de ce qui se passait au Congrès précédent, on observe en pratique la formation de trois groupes qui ont marqué les débats.
La droite, dans laquelle coexistent des groupes de tendances extrêmes et modérées, a fonctionné comme le bloc le plus solide. Bien qu’il y ait eu quelques démarches symboliques de la part des secteurs plus modérés, la discipline interne a été incontestée. Ce bloc atteint environ 38 conventionnels.
Le deuxième bloc- formé d’une soixantaine de constituants - a été celui de la Liste du peuple, les indépendants des mouvements sociaux, les représentants des peuples premiers et le parti communiste. Alors qu’il s’agit du plus grand bloc de la Convention, il est également le moins discipliné et il y a eu plusieurs frictions internes.
Enfin, le Front large (Frente Ampio FA), une alliance autour du PC pour les élections constitutionnelles, a approché le Parti socialiste (appelé Collectif socialiste à la Convention), qui avait pris ses distances par rapport à ses alliés de la démocratie chrétienne et d’autres partis de la coalition traditionnelle de centre-gauche. Ces deux-là ont en outre agi auprès d’un groupe d’indépendants plus modérés appelés Indépendants non neutres. Front large, collectif socialiste et Indépendants non neutres, ont fini par fonctionner ensemble, ce qui leur a donné une part importante du pouvoir. Environ 46 conventionnels sont dans ce bloc. Les autres conventionnels, au nombre de 11, ne les ont pas rejoints.
La dynamique de la convention s’est révélée lors des premiers votes effectués par la Convention.
Les premiers scrutins de la Convention, au cours desquels la Présidente et le Vice-Président ont été élus, sont un bon exemple. Elisa Loncon, représentante du peuple mapuche, a été élue à la présidence et à la vice-présidence, Jaime Bassa, constituant indépendant, élu sur la liste du Front large, FA (Frente Ampio). C’était le ticket gagnant du FA, et du Collectif Socialiste. Ils ont imposé - face aux candidatures présentées par la Liste du peuple, le PC et d’autres constituants indépendants : Isabel Godoy, représentante du peuple Colla, et Rodrigo Rojas Vade, un personnage important de l’ « octubrisme ».
Ce dernier s’est fait connaître en manifestant sur la Place Dignitad, le torse découvert exposant le cathéter de sa chimiothérapie. On le voyait lors de plusieurs manifestations tenir une pancarte avec la légende « Je ne lutte pas contre le cancer, je me bats pour payer la chimio ». D’une manière encore plus dramatique, il se disait condamné. Il aurait quitté sa chimiothérapie pour participer à la convention tant que son corps lui permettait de le faire. Non seulement il était un héros, mais aussi un martyr de la nouvelle Constitution. Littéralement, son corps était ce qui lui donnait une légitimité, lui permettant d’incarner les victimes d’abus du système de santé et, par extension, de l’ensemble du système. C’est pourquoi, au moment où, peu à peu, le bureau de direction a été défini et a intégré divers « vice-présidents adjoints » des différents secteurs de la Convention, personne n’a été surpris qu’il soit élu sur la Liste du peuple.
La mise en œuvre de la Convention a fonctionné malgré la grande hétérogénéité et son niveau de fragmentation. Les Conventionnels sont parvenus à se coordonner et à travailler relativement efficacement à la rédaction d’un règlement pour la nouvelle Constitution. L’ambiance a été très vive à un moment donné, mais généralement toujours collaborative. Tant et si bien qu’une proposition finale de règlement a été conclue dans les délais impartis.
Les sondages ont montré par la suite une baisse d’approbation de la Convention, cela était prévisible après la fin de la lune de miel. Après tout, avec 30% des voix, elle restait de loin l’organe politique le plus accepté. Cependant, il y avait un élément de tension externe qui a eu un impact particulier sur la dynamique de la convention : l’élection présidentielle.
La désintégration de la Liste du Peuple
Une des explications de l’éloignement du PC dans le lancement du processus (qui s’est approché de la Liste du Peuple) et du FA (qui s’est rapproché du Collectif socialiste) se trouve dans le conflit présidentiel qui se déroulait parallèlement au processus constituant.
Le candidat à la présidence du PC, Daniel Jadue, était en concurrence avec le candidat à la présidence du FA, Gabriel Boric, lors d’une primaire qui devait définir quel serait le candidat de la coalition. Tous deux étaient aux antipodes l’un de l’autre lors du débat sur l’accord qui a donné lieu au processus constituant.
Alors que Boric est considéré comme l’un des acteurs clés de l’accord, ce qui implique qu’il l’a signé contre son parti, Jadue était très critique et a remarqué qu’il avait été écrit sur le dos au mouvement social.
Le PC avait parié devenir une sorte de traduction politique de l’éclatement social, à travers la figure de Jadue. Cette thèse était répétée dans les déclarations présentant Jadue comme le seul homme politique crédible qui pouvait représenter la place Dignidad. Conformément à cette thèse, le PC avait opté pour un rapprochement résolu avec la Liste du Peuple, à travers plusieurs gestes dans la Convention.
Le FA et Boric pariaient sur une base diffuse de soutien située aux marges de la Plaza Dignidad. Ils étaient convaincus que le soutien des manifestants était surestimé, les prenant comme un signe de radicalisation de l’axe gauche-droite, alors qu’il reflétait en réalité un mécontentement général à l’égard de l’élite politique et économique.
En définitive, selon le FA, les gens voulaient des changements profonds du modèle économique et un renouvellement des directions politiques, mais ils voulaient aussi un « horizon de tranquillité ». En particulier, le monde des électeurs socialistes qui subsistait, perdant leur illusion face à la direction prise par la coalition de centre-gauche et la direction du Parti socialiste. Tel était le vaste monde que Boric aspirait atteindre, en accord avec son appartenance idéologique au « tronc historique » du PS, en tant que socialiste libertaire.
Dans les sondages, il semblait que la victoire de Jadue était inévitable. Certains secteurs de gauche refusaient que ce soit Boric, représentant de l’accord pour la nouvelle Constitution, qui incarne aussi le changement pour la présidentielle. Cependant, le FA et lui avait remporté une victoire surprise et écrasante avec plus de 60% des voix et un taux de participation élevé.
Outre que l’équilibre des forces était affecté entre les conventionnels du PC et du FA, le résultat inattendu a eu un impact indirect sur la Liste du Peuple.
Le secteur de gauche refusait que Boric soit le représentant de l’accord de la nouvelle constitution craignant qu’il finisse par incarner, à lui seul, le changement lors de la présidentielle. En outre, ses électeurs était perçu comme refusant l’option de Jadue.
Cela les a conduits à pousser la candidature à la présidence de Cristian Cuevas, ancien militant du PC et de la FA, qui avait soutenu Jadue dans les primaires. Cependant, en raison d’une série d’incidents confus et quelque peu embarrassants, la Liste du Peuple a fini par abandonner cette candidature pour opter pour celle du candidat mapuche Diego Ancalao.
Dans le processus, l’organigramme de la Liste du Peuple a été brisé et démembré. Plusieurs conventionnels ont quitté le collectif. L’incident le plus complexe s’est produit lorsque la candidature d’Ancalao a finalement été rejetée, car des milliers de signatures pour son inscription avaient été obtenues frauduleusement (le notaire qui a signé la grande majorité d’entre elles était mort depuis plusieurs mois, entre autres irrégularités).
Comme dernière stratégie de salut, les élus sur la Liste du Peuple ont décidé de mettre fin à tout lien avec ce groupe et, pour faire ressortir clairement leur rupture, ils ont adopté le nom de Peuple constituant.
Cependant, quelques jours plus tard, le collectif récemment lancé a subi un revers. Un article de journal a révélé que Rojas n’avait jamais eu de cancer. C’est ainsi qu’est tombée l’une des figures les plus emblématiques, non seulement de la Liste du Peuple, mais aussi de l’explosion sociale. Le plus grand représentant de la performance héroïque de l’octubrisme, tombait. Celui qui était le meilleur représentant du panthéon héroïque des victimes, a fini par être perçu comme un engrenage de la tromperie et des abus.
Deux mois plus tard
La chute de Rojas Vade s’est produite exactement à deux mois de l’ouverture de la Convention, lorsqu’elle tenait sa première conférence publique. Il s’agissait du compte rendu public sur les progrès du règlement et, au-delà de certains incidents mineurs, d’une gestion réussie. En effet, le vice-président Bassa se déclarait optimiste pour la phase d’installation et annonçait une discussion de fond sur la Constitution.
Après le scandale, une grande partie de la tâche qui attendait la Convention a été laissée en friche et il lui faudra beaucoup de talent pour contourner l’impasse. Alors que le coup a frappé un conventionnel présenté sur une liste, la crise a fini par toucher la convention dans son ensemble. Ceux qui se sont toujours opposés à ce processus, tant de gauche que de droite, y ont vu une blessure difficile à guérir, et font le pari qu’elle continuera à s’élargir.
Il y a cependant encore quelques raisons d’être optimiste. Au-delà du tremblement de terre indéniable que la Convention a subi, elle est encore perçue comme une entité ayant le potentiel d’être quelque chose de très différent de la politique établie. Elle a en sa faveur de rassembler au Chili plus que tout autre organe de représentation. La Convention a encore la possibilité d’être l’épicentre de nouvelles formations, ce qui lui permettrait d’apporter une nécessaire régénération politique.
C’est la formation d’un nouveau « nous » qui inclue toute la société, qui est en même temps le terrain d’où émergeront de nouveaux accords qui devront permettre une médiation que les partis historiques ne parvenaient plus à produire. Dans cet effort, qui sera loin d’être facile, les différentes forces politiques seront à un moment des adversaires, et à d’autres, complices. Mais une chose est sûre, le succès ne dépendra pas de quelques figures lumineuses qui pourraient diriger par leurs vertus personnelles. Le moment de performance est terminé. Pas de victimes héroïques, ni de victimes d’abus. C’est l’heure de la politique.
Septembre 2021, Nuevasociedad