La guerre en Ukraine est dans l’impasse militaire et politique. Les combats qui durent depuis février 2022 n’ont donné l’avantage ni aux Ukrainiens ni aux Russes. Les positions militaires sont figées. La « reconquête » annoncée par Zelensky est un échec magistral. Il vous dira, contre toute vérité, que c’est « la faute » des « Occidentaux » qui tardent à donner les armes décisives. La guerre continue, peu importe le nombre de morts devenu insupportable.

La guerre en Israël qui vient de s’ouvrir après l’attaque cruelle du Hamas - un « crime de guerre » - introduit une nouvelle dimension qui pourrait reléguer la guerre en Ukraine à la seconde place et peut-être même signifier sa conclusion à court ou moyen terme.

Ces deux conflits pouvaient être évités.

Le premier, si les Américains avaient accepté de discuter avec les Russes d’un accord concernant la sécurité dans la région, Minsk 1 en 2014, et si les Européens avaient respecté les accords de Minsk 2 en 2015.

Le second si les Américains avaient intimé aux Israéliens de respecter les quelques dizaines de résolutions de l’ONU au cours du temps, et s’ils n’avaient pas fermé les yeux sur la colonisation de la Cisjordanie. Il y avait eu une lueur d’espoir avec les accords d’Oslo en 1993 signés sous la houlette de Clinton par Rabin et Arafat, bien que certaines revendications du peuple palestinien n’aient pas été reprises, comme le « droit au retour » des Palestiniens expulsés de Palestine lors de la « Nakba » en 1948 et, depuis ce temps-là, réfugiés dans des camps de Jordanie et dans les pays Arabes autour d’Israël. Ce processus de Paix a été interrompu par la mort de Rabin assassiné par un juif fondamentaliste d’extrême droite - la possible coopération de Netanyahou vient d’être dénoncée récemment par le chef des travaillistes, Michaeli (the times of Israël, 31 octobre 2023) - et la mort d’Arafat. Il n’a jamais été relancé.

Le Moyen Orient est la chasse gardée des Américains (le pétrole) et Israël leur bras armé.

Ces deux conflits portent la marque des Etats Unis d’Amérique et révèlent l’assujettissement du « monde occidental », Union européenne, et France comprise, à la politique impériale américaine.

Ces deux conflits ne sont que le prélude à d’autres guerres toutes aussi impériales et déjà annoncées contre l’Iran, la Chine et la Corée du Nord, ou tout Etat qui voudrait s’opposer à la tutelle américaine.

Les Américains, c’est bien connu, luttent contre « le mal », pour « Dieu », « la démocratie » mais aussi pour le « changement de régime ».

Ces deux conflits divisent la « communauté internationale » siégeant au sein de l’ONU. Les votes de sanctions contre la Russie demandés par l’Ukraine et les « Occidentaux » ont été rejetés par les 2/3 de l’humanité. Les « nouveaux acteurs » comme les BRICS, etc.., se sont abstenus ou ont voté contre. Et les débats concernant la guerre en Israël confirment encore plus le fossé entre le « Sud » et l’ « Occident ». L’Etat israélien est perçu comme une inclusion coloniale de l’ « Occident » dans le monde Arabe.

L’Organisation des Nations Unies est ébranlée.

L’ONU a montré son incapacité à résoudre le conflit Israélo-palestinien permanent tout au long de ces 75 ans depuis la fin de la 2ème guerre mondiale et à imposer aux Israéliens la création d’un Etat Palestinien selon la première résolution de 1947 et les suivantes de l’« Assemblée générale (ayant alors fonction d’organe décisionnaire) :

Résolution 181 (29 novembre 1947). Adoption du plan de partage : la Palestine est divisée en deux Etats indépendants, l’un arabe, l’autre juif, et Jérusalem est placée sous administration des Nations unies.

Résolution 194 (11 décembre 1948). Les réfugiés qui le souhaitent doivent pouvoir « rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et vivre en paix avec leurs voisins » ; les autres doivent être indemnisés de leurs biens « à titre de compensation ». Création de la commission de conciliation des Nations unies pour la Palestine.

Résolution 302 (8 décembre 1949). Création de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA). » (Le Monde diplomatique, février 2009).

Aujourd’hui, des voix se font entendre pour « dissoudre l’ONU » ou tout au moins la réformer. C’est ainsi qu’a surgi l’idée d’un « Nouveau monde », dont les différents protagonistes font la promotion d’une manière antagonique.

« Changer ou dissoudre l’ONU » et le « nouvel ordre mondial ».

  1. Le « Nouveau monde » de Zelensky.

Pour Zelensky, l’ONU a une tare : la présence de la Russie avec son droit de véto : « L’ONU doit être réformée pour que le droit de veto ne signifie pas le droit de tuer ». De fait la Russie en guerre contre l’Ukraine, peut stériliser tout débat sur cette guerre, puisqu’elle en est partie prenante tout en disposant du droit de veto. Il veut donc interdire à la Russie d’utiliser son droit de veto sur les questions concernant la guerre en Ukraine. A-t-on fait la même polémique aux USA pour près de 60 guerres depuis 1945 ? Mais son combat contre la Russie va au-delà quand il tente de lancer un débat revanchard et réécrire l’histoire : la Russie devait-elle se voir automatiquement attribué le poste à l’ONU de l’ex URSS après sa dissolution, alors que le procès des « crimes du stalinisme » n’a jamais été évoqué dans l’enceinte de l’organisation ?

En fait il postule pour éjecter la Russie de l’ONU, obtenir cette place, tout en méprisant l’ONU : « La prochaine option serait de carrément de vous dissoudre » ! (Avril 2022).

Zelensky n’est qu’un pion sur l’échiquier de l’oncle Sam. Il commence à s’en rendre compte. Lors d’un sommet de l’Otan (Vilnius, juillet 2023), où l’offre d’adhésion devait être formulée, il a déclaré, frustré de ne pas avoir obtenu de calendrier clair : « C’est sans précédent et absurde alors que le calendrier n’est fixé ni pour l’invitation ni pour l’adhésion de l’Ukraine », a-t-il déclaré. « L’incertitude est une faiblesse. » (France 24)

Zelensky a totalement livré son pays aux Américains. Son présent et son avenir dépendent de la politique des Usa. Et, malgré les quelques plus de 100 milliards, les armements de plus en plus létaux, de plus en plus sophistiqués, le temps passe, les morts augmentent, et toujours pas de solution à un conflit qu'il veut poursuivre « jusqu’au dernier soldat ».

Derrière Zelensky il y a Biden. La guerre ukrainienne, on le sait, n’a pu être lancée qu’avec l’accord des Etats Unis parce qu’elle leur offre une opportunité de combattre la Russie, ce « mal » et son influence grandissante dans le monde et surtout celui du « Sud ».

Cependant il se pourrait que la guerre en Israël puisse finir par modifier la stratégie américaine pour l’Ukraine, et en s’en délivrant, Biden pourrait soit imposer cette charge aux Européens, plutôt réticents, soit y mettre fin avec l’ouverture de négociations que Zelensky et son Etat major soient ou non d’accord.

  1. Le « Nouveau monde », des BRICS et autres

Créé à la sortie de la 2ème guerre mondiale, l’ONU aujourd’hui fait face à un monde bien différent. Les guerres d’indépendances anticoloniales n’avaient alors pas encore eu lieu. Elles se sont échelonnées jusque dans les années 1970. Du « Tiers monde », en passant par les « Pays en voie de développement », aux « BRICS » d’aujourd’hui, la transformation du monde a été assez rapide. Les BRICS, l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie veulent accéder à la responsabilité internationale que leur donne le poids de leurs populations, soit les 2/3 de l’humanité. Leurs besoins sont impérieux et la nécessité de la Paix tout aussi urgente.

Cependant ils ont adopté un mode de développement capitaliste plus ou moins libéral, ou de capitalisme d’Etat en Chine, bien que le capitalisme porte en lui la guerre, cette « destruction/reconstruction » dont il a besoin pour se regénérer et dominer.

Le « Sud » veut élargir et rénover le code international actuel qui est essentiellement entre les mains de l’impérialisme occidental, dont il a souffert et souffre encore. « Le génocide est au cœur de l’impérialisme occidental (..) C’est la pierre angulaire de la domination occidentale. » (Chris Hedges, Scheer Post, usa, 29 Octobre 2023)

Bref, l’organisation de l’ONU, telle qu’elle est aujourd’hui, est devenue trop étroite. Depuis une vingtaine d’années il a été question de la modifier et de l’ouvrir, c’est le statut quo sans volonté réelle des Etats « Historiques ».

Après la fin piteuse et la débâcle américaine en Afghanistan en aout 2021, l’Empire, que l’on pouvait penser assagi, prend la décision de lancer l’offensive contre la Russie et son « opération spéciale » d’envahissement d’une partie de l’Ukraine.

La guerre Russo/Ukrainienne avec une Ukraine sous contrôle américain - qui de fait a commencé à Maïdan en 2014 avec un coup d’Etat soutenu par des milices d’extrême droite en présence  des Américains Nuland et Biden- remet à l’ordre du jour la violence guerrière et la fin d’une paix mondiale plus ou moins maitrisée, cette fois-ci en Europe. Les derniers canons s’y étaient tus avec la fin de la guerre en Yougoslavie 1991/1992, autre guerre de l’Otan, et l’impuissance de l’ONU.

  1. Le « Nouveau monde » de Biden.

Le 11 mars 2022, Biden s’exprima, devant une organisation de grandes entreprises américaines « the Business Roundtable », sur la guerre en Ukraine : « Comme me l'a souligné un militaire haut gradé lors d'une réunion l'autre jour, environs 60 millions de personnes sont mortes entre 1900 et 1946. Et depuis lors, nous avons établi un ordre mondial libéral ».   Il termina ce discours par ces mots « Et c’est maintenant que les choses bougent… Il va y avoir un nouvel ordre mondial là-bas, et nous devons le diriger. Et nous devons unir le reste du monde libre pour le faire. » (RealClearPolitics.com).

Vous l’aurez compris. Biden est pour un « Nouveau ordre mondial » à la condition que Washington en soit le prince ou plutôt l’empereur ! Il veut affronter à ce titre les « puissances du mal « Russie, Chine, Iran, Corée du Nord, etc. ».

Il annonce, non pas un « Nouveau monde » mais de nouvelles guerres !

Et le « nouveau monde » de l’UE et de Macron ?

Qu’elles sont leurs perspectives ? Comment s’expriment-ils sur ce « Monde nouveau » ? Rien qui ne vienne contrarier la globalisation libérale. Ils coopéreront avec l’oncle Sam comme ils l’ont fait pour la guerre en Ukraine et vont le faire dans le cadre de la guerre Israélo-palestinienne. La politique américaine interdit toute voix dissidente, au risque de s’exposer à être désigné et refoulé comme le « mal ».

Alors, en bons vassaux, leur première réaction a été le voyage inopiné d’Ursula Von der Leyen, réagissant à l’émotion, suivie ensuite par des dirigeants européens, l’Allemagne etc. Pour dire quoi ? « Tout pour soutenir Israël contre le terrorisme du Hamas ». Bien sûr il ne fallait pas parler des conditions objectives : rien sur la dure réalité de la colonisation. Le seul qui a eu le courage de sortir de l’émotion et parler politique, c’est Sanchez l’espagnol, réclamant un « cessez le feu » !

Par la suite pas de « cessez-le- feu », remplacé par une molle « trêve humanitaire » de l’ONU à laquelle se sont opposés immédiatement les Usa. L’extermination de la bande de Gaza est en marche.

La France de Macron s’est alignée sur le sentiment général d’effroi de l’Europe. Il ne fallait s’attendre à rien d’autre de la part de Macron. Au début de son premier mandat, n’a-t-il pas déclaré qu’il n’y avait d’autre souveraineté que la « souveraineté européenne » ? Et hop la France et sa politique traditionnellement équilibrée au Moyen Orient, jetée à la poubelle luxembourgeoise ! Il est vrai qu’il ne fait que suivre ses deux prédécesseurs : Sarkozy, Hollande.

En fait la France de Macron a peur. Pensez : 500 000 juifs, et près de 5 millions de musulmans plus ou moins religieux mais solidaires avec le peuple palestinien ! Il est vrai que dans les deux camps il y a des têtes brulées, racistes ou antisémites qui pourraient vouloir en découdre jusqu’à affronter les forces de l’ordre. Il est vrai que des attentats individuels, contre ceux des deux professeurs de lycée, ont affligé les Français et que tous les actes de cette nature doivent être condamnés.

La France de Macron est gouvernée par un banquier, un petit bourgeois de province, qui ne sait rien du monde autre que le monde « occidental » assujetti à l’impérialisme américain. Rien du monde Arabe, rien du monde Africain comme l’a montré l’échec cuisant de la France au Sahel. Pire le gouvernement – soutenu par la droite et le Rassemblement National – a lancé une offensive malsaine contre les forces de gauche pour les obliger à déclarer un soutien exclusif à Israël et accuser le « terrorisme islamique » du Hamas.

Résultat, le fossé s’élargit dans la Nupes entre la position pro Israël ou pro Palestinien, entre PS et FI, une partie des écolos et la FI qui a choisi son camp en bredouillant : la Palestine. Mais pour une fois Mélenchon a fait une déclaration correcte, replaçant l’attentat du Hamas ce « crime de guerre », dans son contexte historique.

L’autre réaction du gouvernement a été « sécuritaire » : supprimer tout débat, et toutes manifestations, bien que le droit de manifester ai été réaffirmé par la justice.

Conclusion

Le combat pour la Paix en Ukraine ou en Palestine est un combat essentiel. Des centaines de milliers de manifestants se sont mobilisés, dans les pays Arabes, où la cause palestinienne est aussi un moyen de critiquer leurs gouvernements engagés dans un « processus de paix » avec Israël - qui occultait la question d’un Etat Palestinien -, et plus généralement dans les pays musulmans. Elles ont été importantes dans certains pays européens qui sont à la pointe de ce combat pour la Paix en Ukraine ou en Palestine, en Italie plusieurs manifestations y compris syndicales nationales, en Allemagne, en Grèce et en Espagne, etc.

Ces deux guerres et l’autre guerre dont on parle peu, celle qui a obligé la population arménienne à fuir le Haut-Karabakh, le haut niveau d’armement dans le monde, l’agressivité de l’Empire, nous démontrent qu’il y a, oui, un changement profond dans ce monde ci pour régler par la guerre des différents territoriaux ou autres.

La remise en cause de la centralité de « Occident » depuis 1945 est à l’ordre du jour. Elle risque de se régler dans le sang par la guerre contre tous ceux qui ne la pensent plus comme allant de soi.

La guerre Ukraine-Russie et la guerre Israélo/palestinienne sont bien les « mères de toutes les guerres » à venir, si nous n ’y faisons pas face ! 

Pour la Paix :

Cessez le Feu immédiat en Ukraine et à Gaza

Libération des prisonniers Russes et Ukrainiens

Reprise des discussions entre Russes et Ukrainiens

Autodétermination des territoires occupés par les Russes et de la Crimée

Libération des otages Israéliens et des prisonniers Palestiniens

Retour aux frontières de 1967 pour la Palestine

Ouverture d’un processus pour un Etat Palestinien

 

 Octobre 2023