Depuis la naissance du capitalisme et la publication du Manifeste communiste de Karl Marx, les débats au sein du mouvement ouvrier ont toujours eu pour thèmes « réforme » ou « révolution ».

Ces thèmes n'ont pas disparu.

Tout au plus pouvons-nous constater que l'effondrement de l' Etat de la bureaucratie de l'U.R.S.S., ainsi que Trotski l'avait toujours prévu, semble avoir donné la main au réformisme.

 

Le réformisme avait autrefois au moins un avantage : il offrait du « grain à moudre » dès lors que le rapport de forces entre les classes le permettait. L'inconvénient, cependant, est qu'il arrivât un moment où ce réformisme conséquent cesse de produire ses effets : il y a une limite pour le capitalisme à ne pas dépasser.

Quoi qu'il en soit, l'Europe et les Etats-Unis, en particulier, se sont engagés de toute manière dans la voie inverse. Cela redonne évidemment une nouvelle actualité à la fameuse formule : «Les conditions de la révolution présupposent qu'en haut on ne sait plus comment gouverner, et qu'en bas on n'accepte plus ses conditions.»

Nous n'en sommes pas là et l'intolérable n'est pas encore à l'ordre du jour.

Toutefois, il nous faut bien considérer que le réformisme est toujours là, et à toutes les sauces. En Grèce, en Espagne, au Portugal, les partis sociaux-démocrates ont entamé leur marche arrière.

Dans notre pays, la nécessité rabâchée des « réformes » est constante, et, par l'effet du hasard, ce sont les couches exploitées qui en sont les principales victimes !

Que ce soit de façon brutale ou insinueuse, la marche arrière est à l'oeuvre, depuis longtemps entrecoupée de quelques paliers dans l'alternance gauche-droite.

En ce qui concerne le conflit actuel sur le recul de l'âge de la retraite, la droite sarkozyste se glorifie d'être à l'initiative de la réforme des retraites depuis 1993 ; réforme qui a contribué à faire reculer le montant des retraites, et à les rendre plus aléatoires, en raison de l'augmentation du nombre d'annuités pour en bénéficier. Encore faut-il préciser que la retraite à 60 ans de Mitterrand n'était effective que si l'on avait le nombre de trimestres requis. La précarité aidant (chômage, changements multiples d'emplois au cours de la vie active, multiplication des contrats à durée déterminée, etc.), l'augmentation du nombre d'années requis pour bénéficier de la retraite à taux plein équivaut à une retraite moindre, par la simple application de la décote.

L'entrée dans la vie active des jeunes, la sortie parallèle des plus de 58 ans (les deux-tiers de la classe d'âge), les interruptions d'activité pour les femmes, en particulier, illustrent ces difficultés dont la masse des participants aux manifestations a pris conscience.

L'on pourrait allonger la liste : moindre revalorisation des retraites (inférieure à l'inflation), abandon du salaire minimum de croissance (S.M.I.C.) au profit d'un salaire minimum variant suivant la hausse du coût de la vie (1 343,77 € brut, pour 35 h. par semaine), multiplication des horaires partiels, rendant ce minimum vital invivable !, chômage intolérable (— 10 % des actifs potentiels), minimums sociaux inacceptables (personnes âgées, handicapés, invalides,...) variant de 460 à 696 €, à peine atténués par des suppléments ridicules pour les handicapés (179 €). Et puis, cette offensive généralisée contre la protection sociale, ce que naguère on appelait le salaire différé...

La part des salaires dans le Produit national brut passé de 70 % à 60 % en dix ans ! Et cette liste n'est pas limitative.

Tout le monde étant touché en même temps, on assiste à la conscience élargie (des jeunes, des femmes, des actifs du public et du privé, des retraités et futurs retraités, etc.) du rouleau compresseur sarkozyste.

A présent, les taux de confiance dans les syndicats sont passés de 36 % en 1993 à 51 % en 2010. La conscience sociale vient de faire un bond. La lutte de classes n'est plus un vain mot. La droite a beau claironné que « la gauche n'a pas de programme », ce qui n'est pas tout à fait faux, les choses changent. Ce sont des centaines et des centaines de milliers de personnes que les syndicats sont parvenus à mobiliser. Le sentiment de devoir se munir d'un programme commun et d'une cohésion syndicale est désormais fort chez les salariés.

Contre Nicolas Sarkozy, l'unité s'impose.

Au point de s'interroger sur la multiplication du nombre de syndicats qui paraissent vouloir changer pareillement la société : ne peuvent-ils donc pas s'unir en une seule grande Centrale syndicale, suffisamment démocratique pour que les débats stratégiques naturels puissent s'y exprimer ?

Œuvrons de sorte que le retour des travailleurs sur la scène de la vie politique se poursuive.