La situation politique en France est désastreuse et se délite jour après jour.
Les mesures retenues par le gouvernement Ayrault et F. Hollande pour relancer l’économie s’adressent exclusivement au patronat avec le pacte de « responsabilité » comprenant des mesures qui visent à alléger le « coût » du travail et la fiscalité des entreprises. La presse s’est emparée du débat y décelant un « tournant réformiste », etc.
D’autre part la succession d’affaires à répétition autour de la personnalité de Sarkozy (attentat de Karachi, financement de sa campagne présidentielle en 2007 par Kadhafi, etc.), dont le cœur est toujours des financements occultes et qui sont exacerbées par les campagnes des médias qui préparent son retour pour 2017, ou affaire de Copé le Secrétaire contesté de l’UMP (lui aussi sous menace de détournement de fonds), après celle de Cahuzac Ministre Ps du budget qui faisait la chasse aux exilés fiscaux (alors que lui-même avait oublié de déclarer ses comptes en Suisse), bloquent tout débat réel autour des problèmes politiques rencontrés par la France et de l’urgence à y répondre.
Les Institutions de la 5ème République déjà affaiblies par le pouvoir délégué à l’Europe, ne semblent plus aux yeux de la population jouer leur rôle, et sont de plus en plus contestées y compris par une partie de la droite dont le sentiment républicain s’est dilué dans un discours revanchard et qui semble chercher une nouvelle légitimité auprès du Front National.
Le « pacte de « responsabilité »
Tout d’abord, il n’y a là rien de proprement français mais purement et simplement l’application de la politique européenne d’austérité, ni plus ni moins. Ces mêmes mesures s’appliquent déjà ailleurs, comme en Italie (cf. l’article sur M. Renzi de D. Moioli), ou en Grèce avec les effets que l’on peut mesurer.
Or à ce que l’on sache, l’Europe est au-delà de la « droite » ou de la « gauche ». Pourquoi ? Parce que la puissance dominante actuelle, l’Allemagne, est dirigée par des coalitions entre la droite chrétienne et la gauche social-démocrate qui s’entendent sur une politique de démocratie sociale qui veut dire en fait «foin de démocratie, foin de la consultation des peuples et du respect de leurs votes » et « vive la cogestion autoritaire avec les Marchés financiers au-delà de la quelle il y aurait le néant», avec de temps en temps pour faire passer « la pilule » quelque petit saupoudrage social pour éviter toute mobilisation revendicative trop importante.
Cette politique s’impose sur un mouvement syndical qui perd ainsi sa volonté de résistance. Le pacte de « responsabilité » français a été présenté et a reçu l’accord de 3 syndicats proches du patronat et surtout désireux, comme la Cfdt, de mettre en place la cogestion à l’allemande. Mais à la différence de l’Italie où ce type de pacte a été signé par la Cgil (cf. art. D. Moioli), en France, la Cgt et Fo l’ont refusé laissant ouverte pour les salariés la possibilité de s’exprimer, de s’organiser et de résister.
Cela est ravageur pour les gauches européennes qui l’une après l’autre se retrouvent réduites à l’impuissance car elles ne peuvent, ni ne veulent affronter ce nouvel impérialisme capitaliste qui ne cesse de les acculer à des reculades sociales et politiques en l’absence de leur volonté déterminée d’agir autour de thèmes alternatifs et anti capitalistes capables d’unifier les différents courants de la gauche.
Un tournant social démocrate ?
Pourquoi cette politique d’application scrupuleuse de mesures qui détruisent le compromis social issu de la deuxième guerre mondiale, est-elle menée par le Ps ?
Dans un article du journal Le Monde (22 Février 2014), {jo_tooltip} éditorialiste à « Marianne » et auteur des « Gauches françaises, 1762-2012 chez Flammarion 2012) | Jacques Julliard {/jo_tooltip}, qui a été proche du courant Rocard et de la Cfdt, fait la démonstration qu’en « France, le réformisme caractérise le socialisme depuis Jean Jaurès », mais le Ps français serait « plus à gauche que la social démocratie politiquement, plus à droite socialement ». C’est tellement vrai que la réponse se trouve dans l’histoire du Ps.
A cet effet la relecture des textes de Rosa Luxembourg rassemblés dans le tome 3 du {jo_tooltip} édition Agone & Smolny troisième trimestre 2013 | « Socialisme en France 1898-1912 » {/jo_tooltip} est signifiante. Rosa Luxembourg qui lisait et comprenait le Français, a suivi la vie politique française dans les années de regroupement des différents courants socialistes et de la fondation du Parti socialiste français, sans ménager ses critiques à leur encontre y compris contre Jaurès. Elle a suivi tout particulièrement l’entrée de Millerand, le premier socialiste dans un gouvernement bourgeois, celui de Waldeck-Rousseau. Son jugement est sans appel. « L’entrée des socialistes dans un gouvernement bourgeois, n’est donc pas comme on le croit, une conquête partielle de l’Etat bourgeois par les socialistes, mais une {jo_tooltip} (ibid. page 90) | conquête partielle du parti socialiste par l’Etat bourgeois ». {/jo_tooltip}
Elle a posé clairement les termes du dilemme Révolution ou Réformisme ? « Le socialisme est pour les uns le résultat de la conquête du pouvoir politique par le prolétariat et d’une transformation sociale complète, pour les autres, le résultat d’une évolution graduelle {jo_tooltip} (ibid. page 177) | au sein de l’entreprise capitaliste et du ministère bourgeois » {/jo_tooltip}
Comme le projet de transformation « Révolutionnaire » s’est échoué sur les rives du stalinisme et de ses épigones et qu’aujourd’hui il n’y a plus de parti révolutionnaire stricto sensu majoritaire dans le prolétariat, (même en Chine dont le modèle néo stalinien est bien loin de celui imaginé par Rosa) il n’y a pour l’instant place que pour des stratégies réformistes. Et la France en est un bon exemple.
Quelle opposition alternative existe-t-il ? Le Pcf n’a quasiment plus de lien réel avec le prolétariat, accroché à son appareil d’élus. Le Parti de Gauche a le projet non dissimulé de croquer et le Pcf et le Ps comme le laisse penser son dirigeant JL Mélenchon. Leur rassemblement dans le Front de Gauche est souvent source de conflit comme on vient de le voir pour les élections municipales alors qu’ils n’ont pu avoir une tactique commune face au Ps et aux Verts. Front de Gauche traversé par le rejet de la souveraineté du peuple, des nations et des Etats, un terme devenu une insulte qui dissimulant une dérive fasciste! Le N.P.A de Besancenot a échoué dans son pari de devenir le deuxième parti de la gauche après le Ps.
Chacun exprime son soutien aux luttes en cours, mais ne peut influer vraiment sur les décisions du patronat et celles du gouvernement. Ainsi les ouvriers, les employés et leurs aspirations, et qui sont la majorité du corps social français, ne sont plus représentés au parlement, avec tout ce que cela suppose comme défiance de leur part envers les Institutions.
Les élections municipales qui vont se tenir les 27 et 30 mars ne permettront pas de modifier le rapport global des forces actuelles. Elles restent jusque là celles pour lesquelles les Français se déplaçaient sans questions, car les maires restent proches de leurs préoccupations quotidiennes.
Toutefois, elles risquent, dans le climat actuel, d’être marquées au premier tour par un taux record d’abstention qui peut favoriser le score du Front National. Au deuxième tour, le réflexe républicain anti Front National devrait jouer.
17 mars 20 14